Coronavirus en Allemagne
Allocation d’activité partielle (chômage partiel ou chômage technique) et autres informations utiles pour les employeurs
Le Coronavirus se répand de plus en plus vite, aussi en Allemagne. Certaines entreprises sont obligées de fermer temporairement, tandis que les salariés touchés doivent rester chez eux pour éviter de contaminer leurs collègues. Quelles sont les conséquences du virus Covid-19 sur les conditions de travail en Allemagne ? Quand un employeur allemand peut-il recourir au chômage partiel ? Quelles mesures doit adopter un employeur responsable, et que peut-il exiger de ses salariés ? Quelles sont des mesures fiscales et en matière d’insolvabilité pour pallier aux difficultés économiques liées au coronavirus en Allemagne? Toutes les questions n’ont pas une réponse juridique claire, et la situation change presque toutes les heures, mais nous pouvons déjà donner des éléments de réponse à certaines questions essentielles. Notamment sur le chômage partiel (allocation d’activité partielle), que le gouvernement allemand cherche à rendre plus accessible.
Quand un employeur peut-il recourir à l’activité partielle (« Kurzarbeit ») en Allemagne ?
En Allemagne, le recours à l’activité partielle est normalement autorisé uniquement lorsqu’une convention collective ou un accord d'entreprise le prévoit, ou si les salariés concernés donnent leur accord. Le recours à l’activité partielle peut également être prévu dans le cadre du contrat de travail. Si ceci n'est pas le cas, le consentement écrit des employés concernés doit être obtenu à bref délai. Le chômage par-tiel ne peut pas être simplement ordonné unilatéralement par l'employeur.
Le recours au chômage partiel n’est possible que pour la totalité d’une entité considérée (« Betriebsabteilung ») de l’entreprise.
Si le recours à l’activité partielle a été autorisé par l’Agence fédérale pour l’emploi (« Bundesagentur für Arbeit »), l’employeur calculera et versera directement aux salariés concernés une allocation d’activité partielle, qui vient s’ajouter au salaire réduit en raison de l’arrêt total ou partiel d’activité. L’employeur se verra rembourser par la suite cette allocation par l’Agence fédérale pour l’emploi. En principe, cette allocation s’élève, selon le cas, à 60 % ou 67 % (pour les salariés avec enfants à charge) de la perte de salaire nette et couvre une durée maximale de mois (prolongations possibles par décret).
A l’heure actuelle, l’employeur doit payer l’ensemble des charges sociales (patronales et salariales) sur cette allocation (à l’exception de l’assurance chômage). Contrairement à la France, à ce jour, l’État allemand ne propose aucune aide ou subvention aux employeurs dans cette situation. Cependant, une réforme est à attendre dans les prochaines semaines en ce qui concerne le paiement des charges sociales, voire détails plus bas.
L’allocation d’activité partielle n’est pas soumise à l’IR allemand (art. 3 Nr. 2a Code de l’impôt sur le revenu allemand).
Les heures de travail chômées doivent être déclarées par l’employeur, par écrit, auprès de l’agence pour l’emploi (« Agentur für Arbeit ») compétente pour l’entreprise concernée.
Dans le cadre de cette demande, outre les renseignements habituels à fournir, il faut indiquer - de manière détaillée - les éléments suivants :
- Les raisons entraînant la baisse des heures de travail.
- Si la baisse des heures de travail est également due à des facteurs normaux liés à l'industrie, à l'entreprise ou aux saisons ?
L’employeur doit enfin déclarer pour justifier du recours au chômage partiel,
- qu’aucun solde de congé payé de 2019 n'est disponible et
- qu'il n'existe pas de crédits de temps de travail utilisables/non protégés
- (Attention : ce point changera probablement avec la réforme susmentionnée), et
- que tous les efforts raisonnables ont été faits pour éviter la baisse d'heures de travail.
Quelles facilités pour l’obtention de l’allocation d’activité partielle (« Kurzarbeitergeld » en allemand) dans le cadre de la crise du Coronavirus en Allemagne ?
Le législateur allemand vient de voter une loi (connue sous le nom de « Arbeit-von-morgen-Gesetz », la « loi sur le travail de demain ») qui devrait entrer en vigueur avant la mi-avril 2020 et applicable jusqu’au 31/12/2020.
Cette nouvelle loi prévoit essentiellement les mesures suivantes :
- Si, en raison de l’évolution économique, des commandes sont annulées, une entreprise peut recourir à l’activité partielle si au moins 10 % des salariés sont potentiellement concernés par la perte de travail qui en résulte (au lieu de 33 % habituellement).
- Selon la législation encore actuellement en vigueur, les entreprises qui recourent à des comptes épargne-temps doivent les utiliser et faire passer les heures à zéro afin d’éviter le recours à l’activité partielle. La nouvelle législation doit permettre d’obtenir l’allocation d’activité partielle (« Kurzarbeitergeld » en allemand) sans qu’il ne soit nécessaire d’utiliser préalablement les comptes épargne-temps.
- Les travailleurs intérimaires pourront aussi toucher l’allocation d’activité partielle, ce qui n’était pas le cas avant.
- Selon la législation actuelle, les employeurs allemands doivent payer 100% des cotisations sociales sur les allocations pour leurs salariés (mise à part l’assurance chômage). Avec la nouvelle « loi sur le travail de demain », ces cotisations seront intégralement remboursées par l’Agence fédérale pour l’emploi. Cette mesure, à l’instar de ce qui avait été fait pendant la crise financière, vise à encourager la formation continue des salariés pendant les périodes d’activité partielle.
Quelles mesures préventives pour les entreprises ?
Dès lors qu’aucun cas de contamination n’a été déclaré parmi les salariés, il n’y a aucune raison de fermer l’établissement et de renvoyer les salariés à la maison par mesure de précaution. Les salariés ne sont pas libérés de leurs fonctions et sont tenus de se rendre au travail.
Cependant, même à ce stade préliminaire, il convient de prendre des mesures préventives et de faire circuler des informations :
- Faire suivre les informations importantes aux salariés et les informer sur les risques de contamination et les symptômes.
- Annuler ou reporter les voyages d’affaires dans les régions à risques.
- Demander aux salariés de signaler s’ils se sont rendus dans une zone à risques ou s’ils ont été en contact avec des personnes contaminées, ou suspectées de l’être, dans les deux dernières semaines.
- Renforcer les mesures d’hygiène. A savoir : le port obligatoire de masques, utile uniquement dans certains cas particuliers, est controversé. Le tribunal du travail de Berlin vient d’être saisi d’une demande de référé introduite par un comité d'entreprise après que l'employeur d’un magasin Duty-Free ait interdit à ses employés de porter des masques et des gants. Finalement, un accord amiable conclu entre les parties a autorisé ces mesures protectives. De plus, les employeurs peuvent interdire tout contact physique aux salariés, par exemple en interdisant les poignées de main.
Crèches et écoles fermées en raison du Coronavirus : quels sont les droits des salariés en Allemagne ?
Les salariés qui, en raison de la fermeture des crèches et des écoles, sont contraints de rester chez eux et ne peuvent pas travailler en home-office, continuent de percevoir leur salaire pendant quelques jours (maximum 2 à 4 jours !) si :
- l’enfant nécessite d’être surveillé ou gardé, et
- aucune autre personne appropriée n’est disponible pour s’en occuper.
Cela signifie que les enfants plus âgés, en bonne santé et responsables peuvent rester à la maison tout seuls ; pour les plus jeunes, les parents doivent chercher un moyen alternatif de garde (mais pas forcément les grands-parents en raison de leur vulnérabilité particulière).
En vue de la fermeture des écoles en Allemagne depuis le 16/3/2020, le ministère du travail allemand étudie actuellement des mesures visant à éviter des pertes de salaire déraisonnables pendant une période plus longue que les 2 à 4 jours de maintien de salaire susmentionnés.
Arrêt des transports publics (train, tram, bus) : les salariés en Allemagne sont-ils autorisés à ne pas se rendre au travail ?
En cas d’arrêt des transports publics, certains salariés pourraient avoir des difficultés pour se rendre au travail. Il s’agit cependant d’un risque supporté par le salarié. Celui-ci doit s’organiser pour arriver à l’heure au travail.
Que faire si vous suspectez un cas de contamination dans votre entreprise en Allemagne ?
- En raison du grand danger de propagation, tout cas de contamination doit être déclaré.
- En premier lieu, il faut informer l'autorité sanitaire compétente. Le salarié concerné doit rester isolé jusqu’à ce qu’un transport (de préférence pour lui seul) l’emmène à un site de dépistage du Covid-19. Il doit ensuite être dispensé d’activité avec maintien de salaire jusqu’à l’annonce des résultats.
- Il faut mener une enquête pour savoir qui s’est trouvé en contact direct avec la personne contaminée.
- L’employeur est tenu de prendre des mesures pour protéger les autres salariés. Dans le pire des cas, il faudra fermer l’établissement et dispenser d’activité tous les salariés tout en maintenant leur rémunération jusqu’à ce que le danger soit passé.
- Le salaire est maintenu si les salariés sont capables et prêts à travailler, car l’employeur n’est pas en mesure de les occuper pour des raisons qui relèvent du fonctionnement de l’entreprise. Le temps de travail chômé n’a pas à être rattrapé.
- Si la nature du travail le permet et que le contrat le prévoit, l’employeur peut demander à ses salariés de travailler à distance, en home office. Sinon, il peut conclure un accord avec ses salariés pour la mise en place du travail à distance dans le cadre de cette situation particulière.
- Il n’est pas possible d’imposer des vacances, par exemple en décidant d’un congé collectif. L’employeur est seul responsable d’une telle fermeture de l’établissement.
- Un salarié qui a contracté le virus et se voit imposer une interdiction de travailler ou une quarantaine par les autorités sanitaires, touche des indemnités en vertu de la loi allemande relative à la protection contre les infections (Infektionsschutzgesetz).
Dans un premier temps, ces indemnités, dont le montant et la durée correspondent à celles des indemnités versées par l’assurance maladie, sont prises en charge par l’employeur. Sur demande, l’employeur peut cependant obtenir le remboursement par les autorités compétentes pour les six semaines pendant lesquelles le salaire doit être maintenu.
Quelles sont des mesures fiscales pour pallier aux difficultés économiques liées au coronavirus en Allemagne?
L’administration fiscale allemande a annoncé qu’en cas de difficultés économiques liées à la propagation du coronavirus, les entreprises pourront bénéficier de diverses mesures d’aide fiscale (Ministère des finances du Bade-Wurtemberg, communiqué du 11/3/2020)
Les mesures envisagées sont les suivantes :
- Réduction ou suspension des acomptes provisionnels de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés, sur demande
- Report des paiements d’impôts dus
- Exemption des pénalités pour retard de paiement
- Renonciation aux mesures d'exécution
Une circulaire du Ministère fédéral des Finances est actuellement en cours d’élaboration.
Existe-t-il en Allemagne des mesures concernant les cotisations sociales ?
Contrairement à la France et en dehors des nouvelles règles en matière de chômage partiel, à l’heure actuelle, l’État allemand ne propose pas d’allègement des cotisations sociales pour les employeurs. Mais les organisations patronales et les chambres de commerce et d’industrie allemandes réclament dès à présent des facilités.
Quelles sont des mesures prévues en matière d’insolvabilité pour pallier aux difficultés économiques liées au coronavirus en Allemagne?
Suspension sine die de l’obligation de dépôt de bilan pour les entreprises touchées par l'épidémie de coronavirus : La législation allemande sur les entreprises en difficulté impose aux entreprises insolvables de déclarer leur état de cessation de paiement auprès du tribunal
compétent dans un délai de trois semaines. Un projet de loi déposé par le gouvernement allemand prévoit que cette obligation à laquelle sont soumises les entreprises allemandes rencontrant des difficultés financières en raison des effets de l'épidémie de coronavirus soit suspendue au moins jusqu'au 30 septembre 2020.
Le gouvernement allemand a annoncé la mise en place de divers instruments visant à soutenir la solvabilité des entreprises affectées par les suites de l'épidémie de coronavirus. Toutefois, pour des raisons organisationnelles et administratives, il n'est pas garanti que ces aides parviennent toujours en temps utile aux entreprises, à savoir dans le délai de trois semaines qui leur est imparti pour déposer le bilan.
Afin d'éviter que les entreprises concernées ne soient obligées de déposer le bilan simplement parce que, en raison de la situation actuelle exceptionnelle, le traitement des demandes d'aide publiques ou les pourparlers en vue d’un financement ou d’un redressement judiciaire ne peuvent aboutir dans le délai impératif de trois semaines, il est prévu que l’obligation de dépôt de bilan soit légalement suspendue jusqu'au 30 septembre 2020. Il est également prévu que le ministère allemand de la justice soit autorisé à proroger cette mesure par décret jusqu'au 31 mars 2021 au plus tard (voir le communiqué de presse du ministère fédéral de la Justice du 16.3.2020).
Notre équipe reste à votre disposition pour toute question à ce sujet.
Ouvrir PDF Imprimer