Droit du travail et cogestion en Allemagne : Conclusion d’accords d’entreprise avec le comité d’entreprise et leurs limites
En Allemagne, il est fréquent que des accords d’entreprise soient conclus au sein des entreprises. L’employeur et le comité d’entreprise, en tant que partenaires sociaux, peuvent, dans le cadre d’un accord d’entreprise, régler un certain nombre de questions touchant à l’ordre social et aux relations globales entre l’employeur et les salariés (telles que l’utilisation d’internet, la saisie du temps de travail etc.). Selon le droit allemand, le comité d’entreprise et l’employeur ne sont néanmoins pas en droit de conclure un accord d’entreprise sur n’importe quel sujet.
La négociation et la conclusion d’accords d’entreprises représentent une part importante de l’exercice des droits de cogestion dont dispose le comité d’entreprise au sein d’une entreprise. Certains accords d’entreprise font l’objet de négociations longues et dures. Toutefois, l’employeur et le comité d’entreprise ne sont pas en droit de régler n’importe quel point par accord d’entreprise.
La primauté des dispositions impératives du droit national
En principe, la compétence réglementaire des partenaires sociaux en Allemagne est limitée par les dispositions d’ordre public du droit national, et notamment les lois et les règlements ainsi que les principes de droit établis par les juges.
Exemple : Il n’est pas possible de prévoir dans un accord d’entreprise une réglementation de congés en défaveur des salariés et dérogeant aux dispositions légales en matière de congés (§ 13 BUrlG - loi fédérale allemande régissant les congés).
La primauté des conventions collectives, notamment en matière de rémunération
La compétence réglementaire de l’employeur et du comité d’entreprise est principalement restreinte par ce qu’on appelle le « Tarifvorrang » (§ 77 Abs. 3 BetrVG – loi allemande régissant les relations entre salariés et employeur au sein de l’entreprise). La rémunération et les autres conditions de travail habituellement régies par les conventions collectives ne peuvent faire l’objet d’un accord d’entreprise en Allemagne. Selon le droit allemand, le comité d’entreprise ne dispose dans ces domaines d’un droit de cogestion juridiquement contraignant que si aucune réglementation légale ou conventionnelle n’existe en cette matière (§ 87 Abs. 1 BetrVG) ;
- Par « rémunération » on comprend toute rémunération payée par l’employeur sous forme d’argent ou d’avantage en nature, telle que salaire, prime ou gratification.
- Les « autres conditions de travail » sont les dispositions contractuelles pouvant être régies par une convention collective, telles que la mise en place ou la rupture de relations de travail, le lieu de travail, les fonctions attribuées au salarié, le montant et l’exigibilité de la rémunération, la durée de travail, les congés, le préavis.
Toutefois, il existe trois exceptions importantes à la restriction de la compétence réglementaire de l’employeur et du comité d’entreprise. Dans les cas suivants, il est possible d’avoir recours à un accord d’entreprise :
- La convention collective applicable autorise expressément la conclusion d’accords d’entreprises complémentaires (« Öffnungsklausel » – clause d’ouverture/de flexibilité). Mais il convient de respecter scrupuleusement les limites fixées par la clause de flexibilité de la convention collective.
- Un accord d’entreprise sous forme d’un plan social n’est pas soumis au « Tarifvorbehalt » (le principe selon lequel il ne peut être dérogé par un accord d’entreprise à une convention collective, à moins que la convention collective ne prévoie une clause d’ouverture correspondante) (§ 112 Abs. 1 BetrVG).
- Il n’existe aucune disposition légale ou conventionnelle.
En principe, l’interdiction de conclure un accord d’entreprise s’applique également au cas où l’employeur lui-même n’est pas lié par une convention collective. Néanmoins, cette interdiction s’applique uniquement si dans le champ d’application géographique, entrepreneurial, technique et personnel auquel appartient l’entreprise de l’employeur, des conventions collectives sont conclues ou sont habituellement conclues.
Cette interdiction n’est valable que si la convention collective régit effectivement certaines conditions de travail.
Exemple : La constatation explicite ou tacite, c.à.d. la constatation documentée des organisations syndicales signataires des conventions collectives de ne pas vouloir réglementer certains domaines, supprime l’interdiction de conclure un accord d’entreprise.
Un accord d’entreprise ayant un impact négatif sur les salariés est irrégulier. Un accord d’entreprise ne peut pas impacter négativement le statut juridique des salariés prévu par la loi. Les accords d’entreprise violant ce principe sont caducs.