Entreprises en Allemagne : A quelles obligations d’information de l’employeur les membres du comité d’entreprise sont-ils soumis avant et après leurs heures de délégation ?
En Allemagne, la loi impose aux entreprises, à partir d’une certaine taille, d’accorder des heures de délégation à un nombre forfaitaire de membres du comité d’entreprise afin qu’ils puissent se consacrer à 100 % à leur activité pour le CE (voir l’art. 38 de la loi allemande relative à l’organisation interne de l’entreprise – Betriebsverfassungsgesetz, « BetrVG »). Depuis un arrêt rendu par la Cour fédérale du travail (BAG) en début d’année, même les membres du CE bénéficiant d’heures de délégation ont l’obligation de prévenir l’employeur, en lui indiquant la durée approximative de leur absence, lorsqu’ils quittent leur travail et lorsqu’ils y retournent dès lors qu’ils partent exercer hors de l’établissement une mission dans le cadre de leur mandat.
Aux termes des dispositions de l’article 38 BetrVG, les établissements allemands employant entre 200 et 500 personnes et dotés d’un comité d’entreprise (rappelons qu’en Allemagne, contrairement à la France, la création d’un comité d’entreprise n’est pas obligatoire mais relève de la seule
initiative des salariés) ont l’obligation de dispenser durablement un membre du CE de son obligation de travail (octroi d’heures de délégation). Ce nombre est porté à 2 pour les établissements employant plus de 500 personnes, à 3 pour ceux dont les effectifs comptent plus de 900 personnes, etc.
Dans le cas jugé en début d’année (voir arrêt du BAG du 24.2.2016, 7 ABR 20/14), il s’agissait de trancher le litige opposant l’employeur allemand, le comité d’entreprise et 3 membres du CE disposant d’heures de délégation sur la question de savoir si les membres du CE disposant d’heures de délégation étaient tenus, avant de quitter l’établissement pour exercer à l’extérieur une mission dans le cadre de leur mandat, de prévenir l’employeur de leur absence en lui indiquant le lieu où ils se rendent ainsi que la durée approximative de leur absence puis de le prévenir à nouveau à leur retour au sein de l’établissement.
D’après les motifs de l’arrêt du BAG, aussi bien les membres du CE non dispensés que ceux disposant d’heures de délégation sont tenus de prévenir l’employeur lorsqu’ils quittent l’établissement pour exercer à l’extérieur une mission dans le cadre de leur mandat puis de l’informer à leur retour. Si les membres du CE dont l’activité est entièrement consacrée à leur mandat ne sont pas soumis à une obligation de travail, l’employeur peut toutefois avoir un intérêt à ce que ces membres du CE aussi le préviennent de leur absence. Ceci est particulièrement vrai si un ou plusieurs membres du CE disposant d’heures de délégation s’absentent temporairement de l’établissement - et ne sont donc pas à la disposition de la direction pendant un certain laps de temps - alors qu’ils sont les interlocuteurs des dirigeants pour régler les questions relevant du droit de codécision du CE (« mitbestimmungspflichtige Angelegenheiten »). Rappelons que, dans les entreprises allemandes dotées d’un comité d’entreprise, l’employeur est tenu d’intégrer le CE dans le processus de décision pour certaines questions définies par la loi ou la jurisprudence. C’est pourquoi l’employeur allemand doit connaître la durée approximative de l’absence de ces membres du CE pour pouvoir, si nécessaire, s’adresser à d’autres membres du CE.
En revanche, toujours selon l’arrêt du BAG susvisé, l’employeur allemand ne peut se prévaloir d’un intérêt légitime à ce que les membres du CE disposant d’heures de délégation lui communiquent, avant de quitter l’établissement, le lieu où ils entendent exercer une mission dans le cadre de leur mandat. En effet, il ne s’agit pas là d’une information indispensable à l’employeur pour lui permettre de prendre ses dispositions pendant l’absence de ces membres du CE.