Entreprises en Allemagne : Licenciement d’un membre du comité d’entreprise
En principe, il est possible de licencier un salarié allemand lorsqu’il existe une cause réelle et sérieuse à son licenciement inhérente à sa personne ou à son comportement. Il est également possible de licencier un salarié pour un motif économique. En cas de faute commise par le salarié, il convient de signifier rapidement un avertissement au salarié (en règle générale, il est recommandé de délivrer l’avertissement dans les 4 semaines après les faits). Ce n’est qu’après cet avertissement qu’un licenciement peut être prononcé en respectant le délai de préavis applicable. En cas de manquement grave, il est en principe possible de procéder à un licenciement pour faute grave. En Allemagne, les membres du comité d’entreprise bénéficient néanmoins d’une protection particulière en matière de licenciement.
Dans quels cas peut-il être procédé au licenciement d’un membre du comité d’entreprise pour cause réelle et sérieuse ?
En droit allemand, le licenciement d’un membre du comité d’entreprise pour cause réelle et sérieuse est, en principe, exclu (§ 15 al. 1 KSchG – loi allemande relative à la protection contre le licenciement).
Cette protection particulière est censée garantir l’exercice libre et indépendant du mandat du salarié sans qu’il n’ait à craindre d’être licencié à tout moment.
Les seules exceptions légales à ce principe sont la fermeture complète de l’entreprise ou la fermeture d’un service de l’entreprise. On entend par un service de l’entreprise une entité bien délimitée d’un point de vue organisationnel disposant de ses propres moyens et de son propre objet. Le licenciement d’un membre du comité d’entreprise pour cause de fermeture d’un service n’est possible que si le membre du comité d’entreprise ne peut être repris par un autre service. Pour ce faire, l’employeur peut même être obligé de licencier d’autres salariés.
Remarque relative à l’indemnité : Contrairement au droit français, l’indemnité de licenciement en tant que telle n’existe pas en Allemagne. Si, dans le cadre d’une procédure devant un tribunal allemand, les parties ne s’accordent pas, par voie de transaction, sur le versement d’une indemnité de licenciement, l’employeur allemand ne peut en principe pas être condamné au versement d’une indemnité. Mais en pratique, dans le cadre d’une transaction homologuée par le tribunal, les juges appliquent souvent la formule suivante : 1 année d’ancienneté = ½ mois de salaire brut.
Durée de protection contre le licenciement
Les candidats aux élections au comité d’entreprise sont protégés contre le licenciement à partir du dépôt de leur candidature. Si un candidat n’est pas élu, cette protection est maintenue pour une durée de 6 mois à compter de la publication des résultats du scrutin.
Les membres du comité d’entreprise élus sont des salariés protégés pendant toute la durée de leur mandat ainsi que pendant les 6 mois suivant la fin de leur mandat.
Licenciement pour faute grave d’un membre du comité d’entreprise en Allemagne
En principe, l’employeur a la possibilité de prononcer le licenciement sans préavis pour faute grave à l’encontre d’un salarié protégé, membre du comité d’entreprise. La loi allemande relative à la protection contre le licenciement n’interdit pas de manière générale le licenciement des membres du comité d’entreprise.
Toutefois, le licenciement nécessite l’accord du comité d’entreprise (§ 103 BetrVG - loi allemande sur l’organisation sociale des entreprises). Pour se prononcer, le comité d’entreprise dispose d’un délai de 3 jours, l’absence de réponse valant refus. Le membre du comité d’entreprise concerné ne pouvant participer au vote, il doit se faire représenter par un membre remplaçant. Seul un accord exprès du comité d’entreprise est considéré comme valable.
En ce qui concerne le motif/la faute grave justifiant un licenciement sans préavis, les mêmes principes que ceux s’appliquant aux autres salariés doivent être appliqués. Sont principalement considérés comme des motifs graves justifiant un licenciement sans préavis, les manquements graves à des obligations rendant impossible pour l’employeur la poursuite de la relation de travail, tels que le fait pour le membre du comité d’entreprise de commettre des actes pénalement répréhensibles au détriment de l’employeur, de collègues de travail ou de clients. A titre d’exemple, on peut citer le détournement de fonds de l’employeur par un membre du comité d’entreprise dans le cadre de son activité au sein du comité.
Si le comité d’entreprise autorise le licenciement, l’employeur peut notifier son licenciement au membre du comité d’entreprise moyennant respect d’un préavis de 2 semaines (§ 626 Abs. 2 BGB – Code civil allemand). Il n’est pas nécessaire de présenter à l’intéressé la déclaration d’autorisation du comité d’entreprise, ce consentement pouvant intervenir de manière informelle (voir l’arrêt de la Cour fédérale du travail : BAG, 4.3.2004, 2 AZR 147/03, NJW 2004, 2612).
En cas de refus du licenciement par le comité d’entreprise ou si ce dernier ne s’est pas prononcé dans les 3 jours, l’employeur peut solliciter du tribunal du travail qu’il autorise le licenciement en lieu et place du comité d’entreprise (voir l’arrêt de la Cour Fédérale du travail : BAG 23.06.1993 - 2 ABR 58/92, NZA 1993, 1052). Il dispose pour ce faire d’un délai de 2 semaines. Le tribunal du travail autorisera le licenciement s’il considère que le licenciement sans préavis pour motif grave est justifié au vu de l’ensemble des circonstances.
L’autorisation du licenciement tant par le comité d’entreprise que par le tribunal du travail doit intervenir avant la notification du licenciement par l’employeur. Il est donc tout à fait possible que, pour des raisons stratégiques, le membre du comité d’entreprise retarde la notification de son licenciement en formant un recours contre la décision du tribunal du travail (dans un premier temps auprès du tribunal régional du travail puis auprès de la cour fédérale du travail). D’ici l’issue de la procédure, plusieurs années peuvent s’écouler, pendant lesquelles l’employeur a l’obligation de maintenir la relation de travail (c’est-à-dire de fournir un travail) et de rémunérer le membre du comité d’entreprise.
Existe-t-il d’autres possibilités de mettre fin au contrat de travail d’un membre du comité d’entreprise en Allemagne ?
Il existe en Allemagne la possibilité de conclure une rupture conventionnelle également avec un membre du comité d’entreprise. Néanmoins, en règle générale, l’intéressé négocie un montant élevé d’indemnité à titre de contrepartie pour la signature d’une telle rupture de son contrat, si tant est qu’il soit prêt à négocier.
A noter qu’en cas de rupture conventionnelle, le membre sortant du comité d’entreprise ne perçoit pas d’allocation chômage pendant un délai de carence pouvant aller jusqu’à 12 mois (§ 159 al.3 SGB III – code allemand de la sécurité sociale livre III).
En définitive, la rupture amiable du contrat de travail d’un membre du comité d’entreprise est donc en règle générale très onéreuse pour l’employeur allemand.