Entreprises en Allemagne: Responsabilité du gérant allemand d’une GmbH (SARL de droit allemand) concernant la légalité du modèle économique de la société
La responsabilité du gérant d’une GmbH est également engagée lorsque, dans le cas où la société exerce des activités sans disposer des autorisations requises, ces activités ne font pas partie de son domaine de compétences mais de celui d’un co-gérant. Par principe, un gérant de GmbH est responsable de l’intégralité des actes passés par la société.
L’obligation d’agir avec soin et diligence qui incombe au gérant d’une SARL de droit allemand n’est pas limitée à son domaine de compétences ou à son domaine d’intervention fixé par les statuts ou l’acte de nomination. Il doit en effet s’assurer également de la licéité des opérations effectuées dans les autres domaines de compétences, et notamment du fait que la société dispose des autorisations administratives nécessaires pour ces opérations. Malgré une répartition des domaines de compétences et une limitation pour chaque gérant de ses domaines d’intervention, tous les gérants sont en principe responsables de l’ensemble des opérations effectuées par la société. Un gérant peut se protéger de la mise en œuvre de sa responsabilité s’il est en mesure de démontrer de manière précise et détaillée qu’il a respecté cette obligation et, le cas échéant, qu’il s’est fait conseiller par des spécialistes.
Dans un litige récemment porté devant les tribunaux en Allemagne, une GmbH avait acheté l’assurance-vie d’une tierce personne et un sursis de paiement de plusieurs années avait été accordé pour le règlement du prix de vente. Selon le code monétaire et financier allemand (Kreditwesengesetz - KWG), cette opération constitue une opération de dépôt qui aurait nécessité l’autorisation de l’autorité fédérale allemande de surveillance des activités financières (Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht - BaFin). La société ne disposait pas d’une telle autorisation. Quand elle s’est retrouvée en situation de cessation de paiements, le demandeur a réclamé au gérant de l’époque des dommages et intérêts pour défaut de paiement. Le gérant s’est défendu en invoquant la répartition des domaines de compétences, arguant que ce n’était pas lui mais son co-gérant qui était responsable du domaine « achat d’assurances-vie », de sorte que sa responsabilité ne pouvait en aucun cas être engagée. En outre, il a invoqué qu’avant la mise en place du modèle économique, il s’était fait suffisamment conseiller et que les avis juridiques qu’il avait reçus confirmaient qu’il ne s’agissait pas d’une opération soumise à autorisation selon le code monétaire et financier allemand.
Les juges ont considéré qu’une répartition des domaines de compétence ne libérait pas le gérant de sa responsabilité fondée sur l’obligation de vérifier s’il fallait ou non demander d’éventuelles autorisations en vue de la mise en place de ce modèle économique avant de le valider. Cette vérification faisait partie de son obligation d’exercer son activité de gérance en commerçant prudent et avisé (art. 43 al. 1 GmbHG – loi allemande sur les sociétés à responsabilité limitée).
L’argument du gérant selon lequel il aurait, avant la mise en place du modèle économique, demandé conseil auprès d’un cabinet d’avocats a certes été jugé pertinent sur le plan juridique par le tribunal, mais ce dernier a considéré que, concrètement, le gérant n’avait pas suffisamment prouvé ses dires. Le tribunal s’est référé à une autre procédure engagée en parallèle à l’encontre d’une société-sœur de la GmbH dans le cadre de laquelle le cabinet d’avocats auprès duquel le gérant de la GmbH s’était renseigné selon ses dires avait informé la gérance de la société-sœur du fait que toute modification dans la rédaction des contrats était soumise à autorisation (voir arrêt du tribunal régional supérieur de Francfort/Main : OLG Frankfurt, Urteil v. 14.10.2016, Az.: 10 U 64/16, ZIP 2017, 179).