SARL de droit allemand: Responsabilité fiscale du gérant d’une GmbH
En Allemagne, la création d’une société à responsabilité limitée a été beaucoup facilitée par la mise en place, il y a quelques années, d’une nouvelle forme de société, la « Unternehmergesellschaft - UG », nécessitant seulement un faible apport. La mise en place de conditions moins contraignantes ont contribué à une forte augmentation du nombre de créations de sociétés. Malgré la responsabilité limitée de la société, le gérant d’une UG ou d’une SARL de droit allemand peut voir sa responsabilité personnelle engagée pour le paiement des charges sociales, tout comme dans le domaine fiscal.
En Allemagne, les créateurs d’entreprises négligent souvent les risques liés à la responsabilité personnelle du gérant vis-à-vis de l’administration fiscale.
Le livre des procédures fiscales allemand (Abgabenordnung - AO) fixe les bases légales pour la mise en oeuvre par l’administration fiscale de la responsabilité personnelle du gérant.
Selon l’article 69 AO, le gérant d’une UG ou d’une SARL de droit allemand peut être poursuivi pour le règlement des dettes fiscales de la société
- si, en raison du comportement intentionnel du gérant ou par sa négligence grave,
- l’administration fiscale n’a pas pu fixer le montant des impôts en temps voulu,
- si les dettes fiscales n’ont pas pu être réglées à temps ou
- ne peuvent être recouvrées.
Selon cet article, le gérant peut également voir sa responsabilité personnelle engagée pour les majorations ou les pénalités afférentes.
Les obligations déclaratives du gérant d’une GmbH ou d’une UG en matière fiscale
Au moment de la constitution de la société, le gérant doit informer l’administration fiscale de la création et de l’enregistrement de la société. Il doit également indiquer à l’administration fiscale la date de début de l’activité sociale.
Le gérant doit toujours signer personnellement les déclarations fiscales de la société. Par sa signature, il s’engage personnellement à ce que les obligations fiscales de la société soient accomplies avec la diligence d’un bon père de famille (voir arrêt de la Cour fédérale des Finances : BFH, jugement du 26.01.2016, VII R 3/15).
L’importance de la question de la Lohnsteuer (assimilable au prélèvement à la source en France) pour le gérant allemand
En Allemagne, l’employeur prélève à la source l’impôt sur le revenu et le reverse directement au Service des impôts compétent. Le gérant doit être très attentif à ce point. L’obligation de payer l’impôt sur le revenu incombe généralement au salarié. La retenue à la source de l’impôt sur le revenu par l’entreprise sert uniquement à faciliter la procédure. De ce fait, les sommes de l’impôt sur le revenu retenues sont, du point de vue de l’entreprise, uniquement des fonds externes gérés par l’entreprise.
Selon la jurisprudence allemande, le non-reversement de l’impôt sur le revenu retenu par l’entreprise au Service des impôts compétent est considéré de manière constante comme une violation intentionnelle ou par négligence grave de l’obligation de reverser l’impôt retenu (voir arrêt de la Cour fédérale des Finances : BFH, jugement du 11.11.2008, VII R 19/08).
La violation d’une obligation peut également entraîner des conséquences pénales (peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans, voire dix ans dans des cas particulièrement graves).
N.B. : Si l’entreprise ne dispose pas de liquidités suffisantes pour pouvoir reverser l’impôt sur le revenu au Service des impôts, le gérant doit limiter la rémunération des salariés de telle sorte qu’il lui reste assez de moyens financiers pour procéder au versement de l’impôt sur le revenu dû.
Les dispositions particulières qui s’appliquent aux gérants allemands en matière de TVA
La violation de la règlementation en matière de TVA n’a pas de conséquences aussi graves mais peut également engendrer des risques pour le gérant. Il convient notamment de respecter le principe du remboursement partiel selon lequel le gérant doit, en cas de difficultés financières, veiller scrupuleusement à reverser la TVA au moins dans la même proportion que les créances des autres créanciers au cours de la même période. En effet, le gérant doit déterminer un taux de remboursement égal à l’ensemble de ses créanciers, y compris pour le Service des impôts.
Remarques générales :
1. Un gérant allemand ne peut pas se libérer de ces obligations en mandatant un expert comptable ou un collaborateur disposant des compétences techniques requises.
2. Si l’entreprise fait appel à un expert comptable pour l’établissement des déclarations fiscales ou la gestion courante des salaires, le gérant est tenu de surveiller de manière constante l’activité de l’expert comptable et de faire en sorte de détecter rapidement les éventuelles irrégularités.
3. En pratique, l’administration fiscale allemande part du principe qu’il n’y a pas de violation intentionnelle et de négligence grave de l’obligation de contrôle fiscal incombant au gérant lorsque l’entreprise dispose d’un service de veille juridique (compliance) bien structuré chargé de surveiller le respect des obligations fiscales. Si, toutefois, l’entreprise commet des fautes en matière fiscale, le gérant ne devrait normalement pas voir sa responsabilité engagée.
4. Toute personne acceptant d’apparaître formellement comme gérant d’une société doit être conscient du risque. La Cour fédérale de justice allemande (Bundesgerichtshof) a confirmé qu’il existait dans de tels cas d’importants risques liés à la responsabilité civile et pénale du gérant.
Les exigences particulières en cas de difficultés financières dans l’entreprise
Lorsque l’entreprise a des difficultés financières ou est même menacée d’insolvabilité, le comportement du gérant est soumis à des exigences particulières. Dès lors que la société risque de se retrouver en état de cessation de paiements, le gérant doit limiter les dépenses de la société au strict minimum.
Dans une telle situation, le gérant d’une UG ou d’une SARL allemande ne peut en aucun cas défavoriser le Service des impôts par rapport aux autres créanciers. Dans ce contexte, il est primordial que le gérant ait, dès la création de la société, exigé la libération des apports sociaux par les associés. S’il ne l’a pas fait, il sera tenu responsable pour le capital non appelé en cas d’insolvabilité (voir arrêt de la Cour fédérale des Finances allemande – Bundesfinanzhof – : BFH, jugement du 5.6.2007, VII R 65/05).