Entreprises en Allemagne : salariés porteurs d’un handicap grave (Schwerbehinderung) et droit d'information du CSE allemand (Betriebsrat)
En Allemagne, les entreprises comptant au moins 20 postes de travail sont tenues par la loi d'employer des personnes gravement handicapées. Selon la législation allemande, les personnes ayant un degré de handicap de 50 ou plus sont considérées comme gravement handicapées. Le chiffre n'indique pas un pourcentage, mais le « degré de handicap ». Celui-ci s'échelonne par tranches de dix de 20 à 100.
Les employeurs ayant entre 20 et moins de 40 postes de travail doivent employer une personne gravement handicapée et ceux ayant entre 40 et moins de 60 postes de travail deux personnes gravement handicapées. Les plus grandes entreprises doivent quant à elles employer au moins cinq pour cent de personnes gravement handicapées.
S'il existe un comité d'entreprise dans une entreprise allemande, celui-ci a le droit d'exiger de l'employeur qu’il fournisse des informations sur le nombre de salariés gravement handicapés employés au sein de l’entreprise ainsi que leurs noms concrets. Une décision de la plus haute juridiction allemande en matière de droit du travail a récemment été rendue en ce sens (BAG, 9 mai 2023 - 1 ABR 14/22 - BeckRS 2023, 26949). La Cour fédérale du travail a expliqué à cette occasion qu'un comité d'entreprise allemand devait avoir connaissance des salariés gravement handicapés présents au sein de l'entreprise afin de pouvoir assurer ses obligations légales. Selon les juges, l'employeur ne peut pas refuser de fournir des informations sur le nombre de salariés gravement handicapés ainsi que leurs noms concrets au motif que ces informations relèvent des dispositions relatives à la protection des données.
Dans le cas jugé, le CSE prévoyait d'organiser l'élection d'une représentation des personnes gravement handicapées (Schwerbehindertenvertretung). Il a en outre fait valoir que ces informations devaient lui permettre d'assurer ses missions de surveillance et de contrôle. Il s'agit par exemple de vérifier si l'employeur remplit ses obligations en matière de protection des salariés gravement handicapés (par exemple en matière d’équipement des postes de travail adaptés aux personnes handicapées ou de possibilité de réduction du temps de travail). L'employeur a refusé de transmettre les noms des personnes gravement handicapées employées dans l'entreprise, faisant valoir qu'il s'agissait de données relatives à la santé hautement sensibles et bénéficiant des dispositions relatives à la protection des données, celles-ci ne pouvant être transmises qu'avec le consentement des employés. Or, dans le cas d’espèce, tous les employés n'avaient pas donné leur consentement. Selon le tribunal, l'employeur était toutefois tenu d'informer le CSE (« Betriebsrat ») sur les travailleurs gravement handicapés et assimilés employés dans l'entreprise. Le droit à la protection des données ne fait pas obstacle au droit d’information du comité d'entreprise, car selon le droit allemand en vigueur en matière de protection des données, le traitement de données à caractère personnel, même sensibles, est autorisé dans des cas exceptionnels « pour les besoins de la relation de travail ».
Notre cabinet se tient à votre disposition pour toute question complémentaire à ce sujet.
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