Employeurs en Allemagne : licenciement pour conduite en état d'ivresse
Selon le droit du travail allemand un salarié peut être licencié en raison de ses agissements en dehors du temps de travail, si ces agissements ont des conséquences concrètes sur la relation de travail. La jurisprudence des tribunaux du travail allemands montre en effet que dans certaines conditions, il est possible de licencier un salarié qui perd son permis de conduire pour avoir conduit en état d'ébriété ou encore un chauffeur professionnel qui consomme des stupéfiants pendant son temps libre.
Toutefois, en droit social allemand, le retrait du permis pour conduite en état d'ivresse ne constitue pas nécessairement un motif grave pouvant justifier un licenciement sans préavis. Dans une affaire récente, le tribunal régional supérieur du travail de la Rhénanie-Palatinat a estimé qu'un licenciement sans préavis, et sans avertissement préalable, était disproportionné et donc nul dans le cas d'un salarié ayant perdu son permis pour conduite sous l'emprise d'alcool (référence du jugement : LAG Rheinland-Pfalz, 6.9.2021 -1 Sa 299/20 ; IWW 225005).
Dans l'affaire en question, le salarié occupait depuis 2009 le poste de responsable grands comptes (keyaccount manager) pour l'ensemble du territoire allemand. Il disposait pour cela d'un véhicule de fonction qu'il pouvait également utiliser à titre privé. Un règlement interne à l'entreprise prévoyait une tolérance zéro pour le taux d'alcoolémie au volant du véhicule de fonction. Le responsable de clientèle a provoqué un grave accident avec son véhicule de fonction après avoir consommé de l'alcool en dehors de ses heures de travail. Son permis de conduire lui a été retiré pour une durée de douze mois.
Il a alors proposé lui-même à son employeurde se rendre chez les clients en transports en commun ou d'engager à ses propres frais un chauffeur pour conduire son véhicule de fonction. Toutefois, l'employeur a résilié le contrat de travail sans préavis, et à titre subsidiaire pour motif réel et sérieux, sans avertissement préalable. Il considérait que le salarié ne pouvait pas exercer son activité sans permis de conduire et que la conduite sous l'emprise de l'alcool constituait un manquement tellement grave à ses obligations qu'un avertissement préalable n'était pas nécessaire.
Le tribunal régional du travail a décidé que le licenciement était sans effet. Il a constaté dans ses motifs que le retrait du permis de conduire peut tout à fait constituer un motif de licenciement pour faute grave si l'activité prévue par le contrat de travail ne peut plus être exercée. Dans le cas d'espèce, le tribunal a toutefois émis des doutes à ce sujet. Le salarié n'était pas un chauffeur professionnel, mais travaillait pour le service clientèle. Ainsi, ce qui importait pour le tribunal était de savoir s'il pouvait exercer cette activité principale sans véhicule de fonction. Le tribunal a conclu qu'il était toujours possible pour le salarié d'utiliser les transports publics pour se rendre auprès des clients. Même si cela n'était pas possible dans tous les cas en raison des temps de trajet, la proposition du salarié d'embaucher temporairement un chauffeur à ses frais aurait été une alternative acceptable. Le tribunal a déclaré que le fait de conduire le véhicule de fonction avec un taux d'alcoolémie élevé constitue une violation des obligations prévues au contrat de travail, même si cela se produit en dehors des heures de travail. Toutefois, dans le cas d'espèce et compte tenu des circonstances, les juges ont considéré qu'un licenciement sans avertissement préalable était disproportionné.
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