Entreprises en Allemagne : Responsabilité en cas de manquements à des règles de droit au sein de l’entreprise (« Compliance »)
Les entreprises risquent d’énormes amendes si leurs collaborateurs commettent des délits ou des infractions. Pour de tels manquements aux règles de conformité, elles peuvent être condamnées à des amendes pouvant aller jusqu’à 10 millions d’euros par cas individuel (on parle alors de « Verbandsbuße »). Mais les risques vont encore bien au-delà.
Si l’entreprise a réalisé des bénéfices ou obtenu des avantages quelconques par le biais de son manquement aux lois, ces bénéfices ou avantages lui sont en outre retirés. Et cela va bien au-delà de la limite des 10 millions d’euros. C’est ainsi qu’en avait décidé le tribunal de grande instance de Munich (LG München I) concernant une entreprise assignée pour faits de corruption et qui avait été condamnée, en plus de l’amende maximale, à payer 200 millions d’euros supplémentaires (affaire n° 5 KLs 563 Js 45994/07).
Même le risque personnel encouru par les membres du Directoire, les gérants et les autres décideurs est loin d’être minime – les dirigeants eux-mêmes encourent des amendes pouvant aller jusqu’à un million d’euros par manquement à leur obligation de surveillance.
En cas de pratiques anticoncurrentielles, les entreprises doivent même s’attendre à des amendes encore plus élevées. Tandis que les personnes directement responsables de telles pratiques se voient condamnées à « seulement » un million d’euros, le Bundeskartellamt (Office fédéral de lutte contre la concurrence déloyale) peut décider d’amendes pouvant aller jusqu’à 10 pour cent du chiffre d’affaires global de l’entreprise. Détail important : l’entreprise sanctionnée ne peut pas, selon la jurisprudence actuelle, se retourner contre le collaborateur. Ainsi en a décidé le Landesarbeitsgericht (cour d’appel en matière sociale) de Düsseldorf (voir arrêt du 20.1.2015, affaire n° 16 Sa 459/14). Le Bundeskartellamt avait prononcé une amende de 191 millions d’euros à l’encontre de l’entreprise concernée. La société en avait réclamé le remboursement à un ancien collaborateur, arguant que celui-ci avait activement participé aux accords d’entente ou que, pour le moins, il en avait eu connaissance. Selon l’entreprise, ce collaborateur avait omis, en violation de ses obligations, d’en aviser le Directoire ou le Département de veille juridique. Les juges n’ont pas suivi cette argumentation. Ils ont considéré que l’amende prononcée à l’encontre de la société n’était pas susceptible de lui être remboursée. Cela découlait de la fonction même de l’amende à payer par l’entreprise. Dans la procédure en question, les juges ont expressément admis l’introduction d’un pourvoi en cassation.