Entreprises en Allemagne : un comité d'entreprise allemand peut demander à l’employeur des informations sur les handicaps lourds des salariés
En application de la loi allemande sur l'organisation des entreprises, un employeur en Allemagne est en principe tenu d’informer le comité d'entreprise en temps utile et de manière exhaustive afin de lui permettre de mener à bien ses missions (§ 80, alinéa 2, phrase 1 Betriebsverfassungsgesetz - loi allemande relative à l’organisation des entreprises). En Allemagne, l'une des missions du comité d'entreprise est de promouvoir l'intégration des personnes gravement handicapées au sein de l'entreprise (§ 80, alinéa 1, n° 4 de la loi allemande relative à l’organisation des entreprises). Dans ce contexte, les litiges entre employeur et comité d'entreprise sont fréquents lorsqu'il s'agit de la transmission d’informations à caractère personnel soumises à la protection des données des employés.
Dans une affaire récente, un comité d'entreprise allemand a demandé à l'employeur de lui remettre une copie du registre des travailleurs gravement handicapés ou assimilés qu’il employait. Au regard du § 163, alinéa 1 SGB IX (Livre IX du Code allemand de la Sécurité Sociale), chaque employeur en Allemagne a l’obligation de tenir en permanence un tel registre et, sur demande, de le présenter aux représentants de la Bundesagentur für Arbeit (agence fédérale pour l'emploi) et du Integrationsamt (office pour l’insertion des personnes gravement handicapées) compétents pour le siège de l'entreprise ou du service.
Dans l’affaire en question, le comité d'entreprise a demandé la transmission des noms, dates de naissance, adresses et degrés de handicap. Il a justifié cette demande par le fait qu'il souhaitait planifier une élection pour la représentation des personnes gravement handicapées conformément au § 177 SGB IX et participer à l'intégration de ces dernières. À cette occasion, le comité d'entreprise a également présenté un concept de protection des données.
L'employeur a refusé de transmettre au comité d'entreprise les noms et autres informations des personnes gravement handicapées employées dans l'entreprise, au motif qu'il s'agissait de données relatives à la santé hautement sensibles et soumises à la protection des données. De telles données personnelles ne pouvaient être transmises qu'avec le consentement des salariés concernés, et certains d'entre eux s’y étaient opposés. Le comité d'entreprise n'était pas d'accord et a fait remarquer qu'il avait élaboré un concept de protection des données.
Le tribunal du travail du Land de Bade-Wurtemberg a jugé que le comité d'entreprise disposait bien du droit à l’information invoqué (référence du jugement : LAG Baden-Württemberg, 20. Mai 2022, 12 TaBV 4/21, BeckRS 2022, 13788). Les juges ont en effet considéré que la demande du comité d'entreprise avait un lien suffisant avec les compétences lui étant attribuées par la loi, et que ce dernier avait présenté un concept de protection des données suffisant. Selon la jurisprudence de la Cour fédérale du travail, un concept de protection des données suffisant fait partie des conditions préalables à l'exercice d'un droit à l'information visant la transmission de données personnelles sensibles (référence du jugement : BAG, 09.04.2019, 1 ABR 51/17, NZA 2019, 1055).
Afin d’être en mesure de mener à bien sa mission légale de promotion de l'intégration des personnes gravement handicapées dans l'entreprise, le comité d'entreprise doit connaître les noms des personnes gravement handicapées. De l’avis du tribunal, l'accomplissement des missions du comité d'entreprise n’est pas soumis au consentement des salariés concernés.
Le tribunal a donc conclu que le refus de l’employeur de communiquer le nombre et le nom des personnes gravement handicapées constituait une entrave illicite aux activités du comité d'entreprise.
Notre cabinet se tient à votre disposition pour toute question complémentaire à ce sujet.
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