Les congés payés en Allemagne
2 décembre 2020
Qui a droit à des congés payés en Allemagne ?
En Allemagne, tout salarié a droit, chaque année, à des congés payés. Ce droit est garanti par la loi allemande sur les congés payés (Bundesurlaubgesetz, BUrlG). Contrairement à la France, c’est l’année civile qui sert de référence.
Sont considérés salariés au sens de la BUrlG :
- les travailleurs et employés
- les personnes en formation professionnelle (y compris les stagiaire et les bénévoles)
- les personnes qui en raison de leur dépendance économique doivent être assimilés à des salariés (indépendance fictive).
Dans le cadre d’un contrat de travail en cours, le droit complet à congés payés naît au début de chaque année civile. Dans le cas d’une nouvelle embauche en revanche, le droit complet naît seulement après expiration d’une période de 6 mois. Avant, le salarié n’obtient qu’un droit partiel de 1/12 de congés annuels par mois.
Quelle est la durée du congé annuel légal ?
La durée minimale du congé légal est de :
- 24 jours ouvrables (c’est-à-dire hors dimanches et jours fériés) pour une semaine de travail de six jours
- 20 jours ouvrés pour une semaine de travail de cinq jours
Pour les employés à temps partiel, qui travaillent régulièrement moins de jours par semaine qu'un employé à temps plein, les congés sont calculés au pro rata, en fonction du nombre de jours travaillés par semaine.
Le contrat de travail peut-il modifier la durée du congé annuel légal ?
Les dispositions légales sur la durée du congé sont des dispositions minimales impératives du droit du travail allemand qui ne peuvent être contournées que ce soit par convention collective ou par accord individuel dans le but de réduire la durée légale du congé. En Allemagne, un salarié ne peut en principe renoncer valablement ni à son droit à prendre des congés payés, ni à son droit à indemnité compensatrice pour les congés non pris à la fin de la relation de travail.
Une convention collective ou un contrat de travail peut néanmoins prévoir l’octroi de jours de congés payés supplémentaires. En l'absence de dispositions contractuelles contraires, les congés supplémentaires sont alors soumis aux mêmes règles que le congé légal. Toutefois, pour la partie dépassant le minimum légal, d’autres dispositions plus favorables à l'employeur peuvent être convenues, telles que la réduction de la durée des congés en cas d'absence ou des modifications des règles concernant les congés partiels, comme par exemple la réduction du nombre de jours à un douzième du congé annuel si le salarié part au cours de la deuxième moitié de l'année civile.
Par ailleurs, certains groupes de travailleurs ont droit à des congés supplémentaires en raison de leur particulière vulnérabilité sociale. En pratique, ces droits à congés supplémentaires touchent surtout les mineurs et les personnes infirmes.
L’employeur peut-il fractionner les congés en Allemagne ?
En application du droit du travail allemand, les salariés ont en principe le droit de prendre l’ensemble de leurs congés sur une période unique et ininterrompue, à moins que des motifs opérationnels ou personnels impérieux ne rendent nécessaire le fractionnement des congés. Si, en raison de tels motifs, le congé ne peut être continu, et que le salarié a droit à plus de 12 jours ouvrés de congés, alors l’une des fractions du congé doit s’étendre sur au moins 12 jours ouvrés consécutifs.
En Allemagne, tout salarié a par ailleurs droit à des congés partiels à hauteur d’un douzième du congé annuel pour chaque mois complet de la relation de travail,
- pour les périodes d'une année civile pendant lesquelles il n'acquiert pas le droit à un congé complet parce qu’il occupe son poste depuis moins de 6 mois, ou
- si, après expiration du délai de 6 mois, il met fin au contrat de travail dans la première moitié d’une année civile. S’il quitte l’entreprise dans la deuxième moitié de l’année, il a droit aux congés annuels complets.
Qu’arrive-t-il aux droits à congés payés en Allemagne en cas de changement d’emploi ?
En théorie, un salarié qui change d’emploi pourrait très bien avoir déjà pris des congés auprès de son ancien employeur et en obtenir également dans le cadre de son nouvel emploi. Compte tenu du fait qu’une telle duplication des droits doit être évitée au regard du droit du travail allemand, l’employé n’a pas droit à des congés payés s’il s'est déjà vu accorder de tels congés par son précédent employeur au titre de l'année civile en cours. En revanche, les indemnités de congés non pris ne sont pas affectées.
Cette réglementation vise uniquement les droits à congés payés découlant du nouveau contrat de travail. Elle ne donne donc à l'employeur de la relation de travail précédente aucune possibilité de réduction des congés dus, ni au salarié de droit d’option pour adresser ses demandes à l'employeur précédent ou suivant.
Lorsqu’un salarié quitte une entreprise, son employeur est tenu de lui remettre une attestation (« Urlaubsbescheinigung »), indiquant le nombre de congés qui lui ont été accordés ou indemnisés pendant l’année en cours. Tant que le salarié n’a pas remis ce document à son nouvel employeur, ou qu’il ne lui a pas démontré d’une autre manière s’il a déjà pris des congés et, le cas échéant, combien de jours, le nouvel employeur peut refuser de lui octroyer des congés.
Dans quels cas le congé minimum légal peut-il être réduit en Allemagne ?
En Allemagne, le congé minimum légal ne peut être réduit que dans le cadre du congé parental, à raison d’un douzième par mois entier passé sans travailler. L’employeur doitcependant donner au salarié une déclaration légale nécessitant réception à cet égard.Pour le salarié, il doit être clair que l’employeur souhaite faire usage de cette possibilité. Le droit de l’employeur à la réduction du congé s’applique également aux congés supplémentaires octroyés en sus du congé minimum légal.
L’absentéisme d’un salarié ne saurait motiver une réduction de ses congés. Le droit au congé minimum légal dépend uniquement de l'existence d’un contrat de travail.
Quelles règles valent en Allemagne concernant l’octroi de congés ?
Concernant la durée et la date des congés, ce sont en premier lieu les souhaits du salarié qui sont déterminants. L’employeur ne peut refuser des congés que si des raisons opérationnelles impérieuses s’y opposent, ou si les souhaits du salarié entrent en conflit avec ceux d’autres salariés. Les motifs opérationnels impérieux peuvent être d’ordre organisationnel, technique, ou reposer sur la situation des commandes. En ce qui concerne les conflits avec les souhaits des autres salariés, les congés du conjoint et les vacances des enfants en âge d’être scolarisé doivent être pris en compte.
Un employeur peut-il interdire la prise de congés pendant une période donnée ?
En Allemagne, seules des raisons opérationnelles impérieuses peuvent motiver un refus de prise de congés. Dans le cadre de la crise du coronavirus, par exemple, un employeur peut temporairement bloquer la prise de congés si le nombre de salariés malades ou en quarantaine est tel que les processus opérationnels ne peuvent plus être correctement assurés.
Report et perte des congés non pris en Allemagne
En application de la loi allemande sur les congés payés, en principe les congés reportés à l’année suivante doivent être octroyés et pris dans les trois premiers mois de l’année. Cependant, il est possible de prévoir contractuellement des délais plus longs.
Au regard d’une décision de la CJUE ainsi que de la jurisprudence actuelle de la cour fédérale du travail, les droits à congés restants de l’année précédente ne s’éteignent automatiquement à l’expiration du délai de trois mois, que si le salarié était effectivement en mesure de prendre des congés pendant cette période. L’employeur doit avoir demandé concrètement au salarié de prendre ses congés, et doit lui avoir indiqué clairement et à temps que les congés non pris seront perdus à la fin de l’année ou à la fin du délai de report. Le droit aux congés s’éteint donc uniquement dans le cas où le salarié a sciemment refusé de prendre ses congés en dépit des indications de son employeur (voir la décision de la cour fédérale du travail allemande BAG, 19.02.2019 – 9 AZR 541/15, NZA 2019, 982).
Quid des congés payés en cas d’arrêt maladie ?
En Allemagne, lorsqu’un salarié tombe malade pendant ses congés, les jours d’arrêt de travail pour cause de maladie prescrits par le médecin ne sont pas déduits de son solde de congés. L’employeur devra maintenir le versement du salaire pendant la durée de son arrêt.
Cependant, la date de retour à l’entreprise reste inchangée : si l’arrêt de travail prend fin avant les congés, le salarié est tenu de retourner travailler à la date initialement prévue. Il ne peut décider unilatéralement de prolonger ses congés du nombre de jours passés en arrêt maladie.
Lorsqu’un salarié se trouve en arrêt maladie pendant une année entière, il continue à acquérir des congés dans leur totalité, et ceux-ci sont simplement reportés à l’année suivante. Dans ce cas de figure, le salarié n’est pas tenu d’en faire usage dans un délai de trois mois. Ainsi, si l’arrêt maladie se poursuit sur plusieurs années, les congés acquis se cumulent. Aujourd’hui, la jurisprudence allemande limite ce cumul à deux ans : les droits à congés expirent au plus tard 15 mois après la fin de l’année pendant laquelle ils sont nés (voir arrêt de la cour fédérale du travail BAG, 07.08.2012 - 9 AZR 353/10, NZA 2012, 1216).
Cependant, le 7 juillet 2020, la cour fédérale allemande du travail a déposé deux demandes de décision préjudicielle devant la CJUE portant sur la question de savoir si les droits à congés payés expirent bien 15 mois après la fin de l’année de référence et sous quelles conditions. Il se peut donc que la Cour de justice de l’Union européenne casse l’arrêt de la cour fédérale du travail et décide que les droits à congés payés peuvent se cumuler de manière illimitée en cas de maladie ou d’incapacité de travail prolongée.
Un employeur en Allemagne peut-il imposer à ses salariés de prendre des congés ?
D’un point de vue juridique, la question de savoir si un employeur peut imposer aux salariés de prendre des congés (par exemple en raison de la pandémie de coronavirus) est très discutable. Il est cependant possible, avec la participation du comité d’entreprise, de décréter des congés d’entreprise, mais uniquement si un besoin opérationnel impérieux prend le pas sur les souhaits individuels des salariés. Les besoins opérationnels impérieux peuvent être d’ordre organisationnel ou technique, ou bien reposer sur l’état des commandes.
L’employeur peut-il imposer la prise de congés dans le cadre de l’activité partielle en Allemagne ?
Une des conditions à l’introduction de l’activité partielle en Allemagne est que les heures de travail perdues soient inévitables, et que l’entreprise ait fait tout le possible pour éviter ou atténuer la perte de travail. L’employeur peut donc temporairement suspendre les crédits d’heures et les heures supplémentaires et imposer aux salariés de prendre les congés qu’il leur reste. En revanche, l’employeur ne peut pas simplement annuler les congés qui ont déjà été approuvés. Le solde de congés restants de l’année précédente doit obligatoirement être utilisé pour éviter la mise en place de l’activité partielle.
Un salarié en Allemagne a-t-il le droit de travailler pendant ses congés ?
Non. La loi allemande interdit aux salariés de travailler pendant leurs congés payés. Cette interdiction ne concerne pas uniquement les prestations fournies dans le cadre d’un contrat de travail, mais toute activité rémunérée allant à l’encontre du principe des congés, qui est celui du repos.
Si un salarié travaille pendant ses congés, son employeur peut lui demander des dommages-intérêts et former une demande pour faire cesser la transgression de l’interdiction de travail. En fonction des circonstances, le salarié s’expose également à un licenciement pour motif lié au comportement (« verhaltensbedingte Kündigung »).
Notre équipe se tient à votre disposition pour toute information complémentaire à ce sujet.
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