Licéité d’une rupture conventionnelle signée sous la menace d’un licenciement immédiat
11 décembre 2020
Dans une affaire récemment jugée en Allemagne, un ancien salarié avait demandé l’annulation de son accord de rupture conventionnelle de son contrat de travail, signé après que son employeur l’ait menacé de licenciement immédiat à défaut de signature. En Allemagne, il existe une différence fondamentale entre la demande en annulation d’une rupture conventionnelle et le recours pour licenciement abusif. Dans le cadre de la demande en annulation d’une rupture conventionnelle, la charge de preuve incombe non pas à l’employeur, mais au salarié.
L’employeur soupçonnait le salarié d’avoir commis une infraction sur son lieu de travail. Placé devant deux alternatives lors d’un entretien personnel, le salarié a décidé d’accepter une rupture conventionnelle par peur d’un licenciement immédiat. Par la suite, il a accusé son employeur d’avoir illégalement exercé une pression sur lui, et a mandaté un avocat en vue de faire annuler la rupture conventionnelle pour cause de menace illégale de la part de l’employeur.
Lors de l’entretien personnel, le salarié n’avait ni admis, ni nié avoir commis l’infraction qui lui était reprochée. L’employeur lui a proposé une rupture conventionnelle pour éviter un licenciement immédiat, et le salarié a signé l’accord de rupture.
Selon le droit allemand, celui qui a été contraint à une déclaration de volonté de manière illégale, à la suite d’une menace, peut annuler ladite déclaration (art. 123 du code civil allemand, BGB). Cependant, et contrairement au cas d’un licenciement abusif, c’est alors au salarié, et non à l’employeur, qu’incombe la charge de preuve.
Selon la jurisprudence établie par la Cour fédérale du travail, la menace d’un licenciement immédiat est, par principe, illégale dans les cas où un employeur raisonnable n’aurait sérieusement pu envisager cette alternative. Par conséquent, un salarié ne saurait être menacé de licenciement immédiat s’il est évident qu’un tribunal du travail jugerait un tel licenciement irrecevable.
Dans l’affaire évoquée ici, les faits étaient litigieux, notamment parce que le salarié niait avoir commis l’infraction dont il était soupçonné. Il s’agissait donc de déterminer si le licenciement immédiat aurait rempli les critères d’un licenciement pour cause de suspicion (Verdachtskündigung). Selon la jurisprudence allemande, ces critères sont les suivants :
- La personne concernée doit avoir été entendue
- L’employeur doit éclaircir les faits de façon à ce qu’il reste aussi peu de doute que possible
Dans l’affaire jugée, des témoins crédibles se sont exprimés contre le salarié, si bien que le tribunal a jugé que l’employeur était dans son droit lorsqu’il a envisagé l’éventualité d’un licenciement immédiat pour cause de suspicion. Le tribunal du travail et la Cour fédérale du travail ont donc tous deux débouté le salarié de sa demande en annulation de l’accord de rupture amiable (Tribunal du travail de Rhénanie-Palatinat, jugement du 10 mars 2020, référence 8 Sa 40/19, BeckRS 2020, 7839).
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