TVA et déduction de TVA en Allemagne : Mentions obligatoires sur la facture : Le prestataire doit-il mentionner l’adresse de sa boîte aux lettres ou bien le lieu d’exercice de l’activité économique ?
Pour que le destinataire d’une facture puisse déduire la TVA, suffit-il que le prestataire fasse figurer sur la facture une adresse à laquelle se trouve une simple boîte aux lettres ou doit-il indiquer une adresse à laquelle il exerce son activité économique ? Jusqu’à présent, les autorités fiscales Outre-Rhin et la jurisprudence allemande considéraient en règle générale que c’était le lieu où le prestataire exerçait effectivement un minimum d’activité économique qui comptait. Avec pour conséquence que nombre de partenaires commerciaux d’entreprises disposant en Allemagne d’une simple boîte aux lettres se voyaient refuser la possibilité de déduire la TVA, avec le risque d’être rapidement confrontés à des difficultés de trésorerie. La Cour de Justice européenne (CJUE) doit trancher sur cette interprétation stricte des règles applicables en matière de TVA.
La Cour fédérale des Finances (BFH) considère que l’adresse à retenir est celle du lieu d’exercice des activités économiques.
Si les mentions requises pour faire valoir la TVA déductible ne figurent pas sur la facture ou si elles sont incorrectes, le bénéficiaire de la prestation ne peut, selon les règles du droit fiscal allemand, prétendre à déduction de la TVA. La Cour fédérale des finances a en effet jugé que le critère de l’« adresse complète » (art. 14 al. 4 phr. 1 n° 1 UStG – loi allemande relative aux règles applicables en matière de TVA) n’était rempli par la mention de l’adresse correcte du prestataire que si celui-ci y exerçait effectivement ses activités économiques (Décision de la Cour fédérale des finances / BFH du 22.7.2015, V R 23/14). Si toutefois aucune activité économique sérieuse n’est exercée à l’adresse allemande figurant sur une facture, le destinataire de la facture ne peut, selon cette position, prétendre à déduction de la TVA. En tout état de cause, cela doit toujours être le cas si le destinataire de la facture n’est pas de bonne foi en ce qui concerne les mentions portées sur la facture, c’est-à-dire s’il savait ou ne pouvait ignorer qu’aucune activité économique n’est exercée à l’adresse indiquée.
Sont notamment également concernés par ce cas de figure les partenaires commerciaux d’entreprises étrangères disposant d’une simple boîte aux lettres en Allemagne.
Une simple boîte aux lettres en Allemagne comme siège de l’émetteur d’une facture peut-elle à l’avenir suffire pour que le destinataire de la facture puisse déduire la TVA ?
Entre-temps, la CJUE a, dans un cas similaire, défini une position bien moins stricte. Ainsi, la Cour fédérale des finances, semblant douter elle-même de la conformité de sa jurisprudence avec le droit européen, a soumis la question à la CJUE (Décision de la Cour fédérale des finances / BFH du 6.4.2016, V R 25/15). Ce fait même fait apparaître une tendance allant dans le sens d’un dispositif moins strict en Allemagne. C’est également ce qui ressort de la soumission de cette question à la CJUE dans une affaire parallèle (Décision de la Cour fédérale des finances / BFH du 6.4.2016, XI R 20/14). Dans sa décision, la Cour fédérale des finances indique qu’il n’importe probablement pas de savoir si une activité économique est effectivement exercée à l’adresse indiquée. Pour le surplus, il suffit – pour le bénéficiaire de la prestation – que la facture fasse figurer la boîte postale ou le CEDEX (section 14.5 al. 2 phrase 3 UStAE - décret d’application de la loi allemande relative à la TVA).
Dans un cas jugé en 2015, la CJUE a confirmé que les exigences formelles en matière de facture étaient remplies alors même qu’à l’adresse indiquée au Registre du commerce et sur la facture comme étant l’adresse du siège, aucune activité économique n’était possible (Arrêt de la CJUE du 22.10.2015,
C-277/14, "PPUH Stehcemp"). Pour les destinataires de factures en Allemagne, on peut donc en conclure que
- pour pouvoir déduire la TVA, il n’est pas nécessaire que la facture remplisse toutes les exigences formelles, ou que
- pour le moins aucune adresse à laquelle sont exercées des activités économiques n’est requise.
La Cour fédérale des finances doute également du fait que les exigences qu’elle pose en matière de déductibilité de la TVA soient, selon le droit allemand, et pour des raisons de protection de la confiance légitime, conformes à la position défendue par la CJUE. En effet, du jugement rendu dans l’affaire "PPUH Stehcemp", on peut en toute probabilité conclure que le droit à déduction de la TVA existe aussi, pour des raisons de protection de la confiance légitime, lorsque l’entrepreneur n’avait pas ni ne pouvait avoir connaissance du fait que
- le chiffre d’affaires concerné faisait partie d’une fraude fiscale commise par le fournisseur, ou que
- la TVA résultant d’un chiffre d’affaires antérieur ou postérieur n’avait pas été reversée.
A l’heure actuelle, la Cour fédérale des finances défend une ligne plus stricte dans la mesure où elle considère que
- l’entrepreneur devait être de bonne foi, et
- qu’il n’était pas en mesure de reconnaître que les exigences formelles en matière de mentions obligatoires sur les factures n’étaient pas remplies.