Droit du travail en Allemagne : Licenciement d'un salarié dans une petite entreprise
17 mai 2024
En Allemagne, les salariés sont en principe protégés par la loi relative à la protection contre le licenciement (Kündigungsschutzgesetz ou KSchG), laquelle prévoit qu'un salarié ne peut être licencié sans cause réelle et sérieuse.
Cependant, cette loi ne s'applique pas dans toutes les situations.
En effet, un salarié allemand doit avoir été employé par l'entreprise pendant au moins six mois avant de pouvoir bénéficier de cette protection contre le licenciement.
Par ailleurs, la loi allemande relative à la protection contre le licenciement ne s'applique pas aux entreprises qui emploient 10 salariés ou moins en Allemagne (les Kleinbetriebe, ou « petites entreprises »). Selon le texte de la loi, celle-ci ne s'applique pas aux entreprises « qui emploient habituellement dix salariés ou moins, à l'exclusion des salariés affectés à leur formation professionnelle ». Dans ces entreprises, l'employeur peut donc licencier un salarié sans motif.
En tout état de cause, même dans les cas où la loi allemande sur la protection contre le licenciement susmentionnée n'est pas applicable, le licenciement d'un salarié en Allemagne ne doit pas enfreindre le principe de l'interdiction de représailles (« Maßregelungsverbot »). L'article 612a du code civil allemand prévoit à cet égard ce qui suit : « L'employeur ne peut pas désavantager un travailleur dans le cadre d'un accord ou d'une mesure parce que le travailleur exerce ses droits de manière licite ». Selon la jurisprudence de la Cour fédérale du travail, la rupture d'une relation de travail peut constituer une telle mesure au sens de l'article 612a du Code civil allemand.
Une violation de l'interdiction de représailles est caractérisée dès lors que l’exercice licite des droits du salarié constitue le motif principal, c'est-à-dire le motif essentiel, de la mesure qui lui est préjudiciable. Dans ce contexte, l'employeur allemand est toutefois protégé dans la mesure où un employé qui conteste un licenciement pour violation de l'interdiction de représailles supporte la charge de la preuve de l'existence des conditions énoncées à l'article 612a du Code civil allemand et donc, du lien de causalité entre la mesure préjudiciable de l'employeur et l'exercice licite du droit par le salarié.
Dans un jugement récent, un tribunal régional du travail allemand s'est prononcé sur l'interdiction de représailles dans le cadre d'un licenciement dans une petite entreprise (LAG Köln, 23.1.2024 - 4 Sa 389/23, BeckRS 2024, 3351). Le tribunal a retenu qu’une violation des dispositions de l'article 612a du Code civil allemand était incontestable lorsqu’un employeur d'une petite entreprise fonde un licenciement sur des désaccords et des problèmes dans les relations interpersonnelles au sein de l'entreprise. En l’espèce, des conflits ont éclaté au sein de l'équipe de la petite entreprise allemande concernée, notamment entre la salariée licenciée et une autre salariée. Par ailleurs, à partir de la mi-mai 2022, la salariée concernée par le licenciement a été en arrêt maladie. Elle a présenté à cet effet un certificat d'incapacité de travail puis un certificat de suivi. La date de fin de l'incapacité de travail renseignée dans le certificat était un vendredi. Le lundi suivant, l’employée s'est à nouveau déclarée en maladie et a transmis par WhatsApp une photo d'un certificat d'incapacité de travail. Par lettre du même jour, l'employeur a mis fin à la relation de travail existante. La salariée a estimé que le licenciement était dû à son arrêt maladie, qu'il était donc contraire à l'interdiction de représailles et qu'il n'était pas valable. L'employeur a quant à lui affirmé que la maladie de la salariée n'était pas à l'origine du licenciement. Au contraire, le licenciement aurait été prononcé eu égard aux conflits existants depuis longtemps au sein de l'équipe de l'employeur. Les autres salariés auraient alors fait quelques reproches à la collègue licenciée concernant son comportement sur son lieu de travail. Dans leur jugement, les juges ont confirmé qu'il y avait bien une violation de l'interdiction de représailles, « lorsque l'exercice autorisé du droit du salarié est le motif principal, c'est-à-dire le motif essentiel de la mesure préjudiciable. Il ne suffit pas que l'exercice du droit ne soit que le motif extérieur de la mesure. Si l'employeur agit sur la base d'un faisceau de motifs, c'est le motif essentiel qui doit être pris en compte ».
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