Prescription des congés payés des salariés rendue plus difficile en Allemagne
En Allemagne, les employeurs ont l'obligation d'informer correctement leurs salariés de leurs droits aux congés payés. Cette obligation revêt désormais une importance encore plus grande pour les employeurs en Allemagne.
Dans un arrêt récent, la Cour de justice de l'Union européenne a encore renforcé les conséquences qu’entraîne le fait pour une entreprise de n'avoir pas correctement informé ses salariés du solde de leurs congés payés ou d’avoir complètement omis de le faire.
En Allemagne, contrairement à ce qui est le cas en France, la période légale de prise des congés payés est l’année civile. Déjà en 2019, la Cour fédérale du travail (Bundesarbeitsgericht) a posé la règle selon laquelle les salariés sont déchus de leurs droits à congé non pris à la fin d'une année civile n’était plus d’application d'office.
Le salarié est déchu de son droit à congé seulement
- si l'employeur a invité son salarié suffisamment à l'avance à poser les jours de congés qu'il lui reste - même si le salarié ne peut de fait plus prendre de congés en raison d'une longue maladie au cours de l'année civile,
- en indiquant le solde de jours de congé non pris et
- à condition qu’il indique expressément qu’à défaut, ces jours de congés seront perdus.
Nous avons déjà publié un article détaillé à ce sujet.
Cet arrêt de 2019 a soulevé un certain nombre de questions. De nombreux employeurs considéraient qu’en dépit du fait que la déchéance des droits aux congés n’était pas automatiquement acquise en cas de non-respect des conditions susmentionnées, ces droits se prescrivaient à tout le moins – en application du droit commun allemand - à l'expiration du délai légal de prescription de trois ans.
La déchéance et la prescription sont deux concepts juridiques différents, mais elles ont toutes deux la même conséquence : le défendeur (en l'occurrence l'employeur) ne peut plus se voir opposer le droit aux congés.
Dans deux arrêts récents, la Cour de justice de l'Union européenne s'est opposée à l'application de la prescription dans ce cas de figure (réf. : C-518/20, C-727/20, C-120/21). Les juges luxembourgeois ont décidé que le délai de prescription normal prévu par le droit allemand ne s'appliquait pas si l'employeur n'avait pas invité le salarié à poser ses congés conformément aux principes susmentionnés.
Cela comporte des risques importants pour les employeurs, car les droits aux congés subsistent indéfiniment tant que l'employeur n'a pas agi correctement (c'est-à-dire conformément aux trois conditions ci-dessus) en vue de la prise des congés payés. C'est notamment à la fin de la relation de travail que le salarié peut faire valoir à l'encontre de l'employeur des droits considérables en matière d'indemnisation.
En revanche, dans la mesure où l'employeur a respecté les conditions susmentionnées, les droits aux congés sont en principe perdus à la fin de l'année civile et peuvent être reportés sur les trois premiers mois de l'année suivante que dans des cas exceptionnels et particuliers.
Cette affaire illustre une fois de plus l'importance pour les entreprises en Allemagne de demander correctement et de manière complète à leurs salariés de solder leurs congés payés. Il conviendrait de le faire par écrit ou par mail afin, en cas de litige, de pouvoir prouver même des années plus tard que la demande a bien été effectuée.
Notre cabinet se tient à votre disposition pour toute question complémentaire à ce sujet.
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